La signature des traités d’alliance avec l’Angleterre ne nous met pas à l’abri d’un conflit avec nos voisins allemands.
Dans un sens, le rapprochement avec la Russie et l’Angleterre, pousse l’Allemagne à s’entendre de façon étroite avec son voisin autrichien.
L’Europe se retrouve ainsi divisée entre deux grands blocs, puissants industriellement et également ambitieux (même volonté coloniale, désirs rivaux de nouveaux débouchés pour produits manufacturés…). L’affrontement entre ces puissances serait désastreux compte tenu des moyens pouvant être engagés pour faire la guerre. C’est du moins l’analyse que nous faisons dans l’entourage du ministre.
C’est la raison pour laquelle nous ne désespérons pas de maintenir des relations correctes avec l’Allemagne…tout en préservant les intérêts français.
Pour explorer cette voie diplomatique étroite, nous avons provoqué des contacts informels et discrets avec des envoyés du chancelier prince von Bülow. Nous nous faisons expliquer le système de décision en vigueur au sein du Reich. Nous échangeons aussi sur les acquis sociaux dont bénéficient les allemands et qui doivent nous inspirer dans notre propre politique intérieure.
Si ces contacts restent très cordiaux d’un point de vue humain, nous restons pessimistes sur l’avenir des relations franco-allemandes.
Nos correspondants allemands nous décrivent, à mots couverts, leur chancelier comme intelligent mais présomptueux et cynique.
L’Empereur Guillaume et lui, nous disent-ils, font preuve de la même légèreté dans la conduite des affaires.
Pour autant, l’Allemagne mérite que l’on s’y intéresse: Les produits « made in Germany » sont de grande qualité (contrairement à se que pensaient les anglais lorsqu’ils inventèrent ce label), les caisses d’assurance sociale se développent, les tribunaux sociaux protègent les intérêts des travailleurs. Et je ne parle pas du foisonnement culturel de Berlin.
Non décidément, une guerre avec un tel voisin serait un désastre…