Cela a du bon de travailler non loin du Président du Conseil et sous les ordres d’une hiérarchie principalement issue de la grande bourgeoisie parisienne. Cela me donne accès à des milieux que je ne pourrais côtoyer autrement.
Ainsi la princesse de Polignac qui soutient des musiciens merveilleux (Gabriel Fauré, Maurice Ravel, Erik Satie…), n’aurait normalement aucune chance de faire partie de mes relations habituelles… ce qui n’est pas le cas de mon chef, M. de B…, souvent invité dans sa maison rue Cortambert, dans le 16ème arrondissement. Moins amateur d’art et de musique que moi, il me cède souvent et volontiers son invitation et m’introduit à chaque fois qu’un concert (ou une répétition publique) est organisé par un petit mot que je présente lorsque je me rends à sa place sur les lieux.
Je suis actuellement séduit par la création -en cours – d' »Iberia » de M. Albeniz.
Musicien espagnol, dédaigné -nous dit-il – par son propre pays et de retour à Paris, il se lance actuellement dans l’écriture de cette oeuvre très originale.
Des rythmes endiablés et inventifs, des ruptures de mélodies, un tourbillon d’impressions…je peine à trouver mes mots pour qualifier cette musique chatoyante.
Par la magie de notes audacieuses, nous ne sommes plus dans notre Paris souvent gris et pluvieux mais dans cette Espagne que je ne connais pas mais que j’imagine chaude et colorée.
Nous suivons une procession religieuse puis nous arrêtons à un petit port de pêche, après avoir eu le temps de nous plonger dans une rêverie romantique; interrompue par une valse syncopée.
La pianiste d’origine catalane Blanche Selva
Les musiciens qui nous font vibrer et répètent pour l’instant les premier et second livres d' »Iberia », sont des virtuoses hors pairs, notamment la pianiste Blanche Selva. La partition a la réputation d’être très difficile voire presque « injouable », pour reprendre l’expression d’Isaac Albeniz lui-même.
Mais au bout de ces efforts, quelle ivresse pour les auditeurs!