Paul Claudel fait partie des fonctionnaires dont je suis la carrière avec attention. Ses demandes de mutation, d’évolution passent entre mes mains et je fais en sorte que ses missions n’handicapent pas son œuvre créatrice.
Consul suppléant à Boston en 1893, gérant de consulat à Boston en 1894, il passe ensuite quinze années en Chine. Un pays qui le marque profondément : Shangaï, Hankeou puis Fou-Tcheou. Il agit en faveur des missions catholiques et contribue à la préservation du patrimoine architectural de cette immense nation.
Le consul Paul Claudel
Dans la journée, vissé à sa table de travail, il écrit des rapports, rend des notes, se concentre sur l’obscure vie diplomatique : « je tâche de gagner mon argent » : « je suis payé » me dit-il souvent.
Le soir, lui qui n’aime pas la vie mondaine, il s’enferme pour écrire.
Il vient d’achever ses Cinq grandes Odes : L’Esprit et l’eau, le Magnificat, La Muse qui est la Grâce et la Maison fermée. Au fil des lignes et des vers, nous partageons l’extase lyrique et la foi d’un poète qui nous associe à sa recherche du beau. Inspiré par sa rencontre avec Rosalie Vetch, son amour interdit, il célèbre la femme et sublime son désir pour elle. Il nous livre des poèmes rythmés, emplis d’une mélodie provoquant une émotion sincère :
« Point de contorsions : rien du cou ne dérange les beaux plis de ta robe jusqu’aux pieds qu’elle ne laisse point voir !
Mais je sais assez ce que veulent dire cette tête qui se tourne vers le côté, cette mine enivrée et close, et ce visage qui écoute, tout fulgurant de la jubilation orchestrale !
Un seul bras est ce que tu n’as point pu contenir ! Il se relève, il se crispe,
Tout impatient de la fureur de frapper la première mesure ! »
Je range ces lignes à côté des rapports venant du nouveau consul de Prague. Un certain Paul Claudel.
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