« Claudine a l’école » n’annonçait rien mais apportait tout ; ce titre racoleur annonce tout mais n’apporte rien. Ingénue et libertine ! Que la réclame commence ! Les badauds qui veulent se divertir avec ce qu’ils ont compris des premiers Colette choisiront « l’ingénue » en sachant que cette dernière se révèlera forcément coquine. Les ignorants alléchés par la chair fraîche à la mode Ancien Régime décadent, vont préférer le mot « libertine. » Venez et servez-vous ! Du sexe, un peu d’immoralité, des émois nombrilistes et quelques jolies scènes aussi bien troussées que l’héroïne Minne.
Colette en 1909, elle publie un livre à succès : « L’Ingénue Libertine »
La série des Claudine apportait des pages de plaisir, le livre de Colette qui sort aujourd’hui agrège des lignes produites au kilomètre. Il faut bien vivre ma pauv’dame. L’écrivain, séparé de Willy, reprend deux manuscrits déjà publiés pour n’en faire qu’un. Vous avez lu les deux romans « Minne » et « Les égarements de Minne » ? Vous êtes censés aimer cette nouvelle production expurgée des apports de l’ancien mari, beau parleur, au talent moins affirmé que celui de sa femme. Deux manuscrits réunis en un seul pour un nouveau départ dans la vie littéraire, dans la vie tout court. Colette signe enfin de son vrai nom et marque son indépendance.
C’est un autre livre que l’on attendrait d’elle. La passion montante et fatale décrite dans « Claudine en ménage » où, pour la première fois, une plume de grand talent décrivait l’attirance entre deux femmes, laisse la place à une recherche banale de l’amour, des choses interdites et des émois d’alcôves.
Les « ah, oh » hypocrites d’une héroïne simulant le plaisir au lit renvoient aux mêmes exclamations lourdaudes de ceux qui viendront se rincer l’œil dans ce livre bancal. Deux parties bien distinctes qui s’assemblent aussi bien qu’un chapeau vert sur une robe rouge cachent quelques pépites ici et là. La fin où Minne découvre l’orgasme… dans les bras de son mari n’est pas l’hommage bien tardif à la morale rassurant les critiques littéraires de la presse de droite mais nous rappelle surtout que Colette sait choisir les mots doux, les phrases tendres et les tournures ciselées qui transforment une agréable scène de lit en moment littéraire jubilatoire.
Les 300 pages du roman sont ainsi faites. Pour dix lignes alimentaires produites par une femme qui doit payer son loyer, on en découvre trois ou quatre écrites d’une main géniale. Espérons que ces dernières annoncent des romans futurs qui feront moins la joie des kiosques de gare et plus le bonheur des vrais amis de Colette rêvant qu’elle se confie à nouveau sans jamais nous lasser, en caressant son chat.
Après les jeux coquins mais vains, on attend le retour d’un vrai « je » sensuel et malicieux.
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« Il y a un siècle », devient aussi un livre (le blog continuera). Fin novembre, dans votre librairie : « Il y a 100 ans. 1910 » http://www.oeuvre-editions.fr/Il-y-a-100-ans
Je ne l’ai pas du tout ressenti comme cela car ce n’est pas du tout un livre érotique. Au contraire, l’héroïne cherche seulement le plaisir et à l’époque le dire est vraiment révolutionnaire, car une femme, jamais ne devait le revendiquer. La publication du rapport Hite dans les années 1970 a montré que de nombreuses femmes étaient malheureuses et insatisfaites sans jamais en parler car la revendication du plaisir féminin était totalement tabou. Révolutionnaire donc Colette.
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