29 janvier 1908 : Prague, ville allemande ou tchèque ?

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Prague, le Pont Charles

Ville de mélanges, ville de mystères.

Mélange des cultures allemandes, juives, tchèques; luttes de la Réforme, victoire de la Contre Réforme.

Capitale prospère d’une Bohême multiple, industrielle au nord, rurale vers l’Egerland, aride parfois mais plus souvent couverte de forêts ou de champs soigneusement entretenus.

Entrée dans une ville où les anciens racontent toujours les mystères du moyen âge, évoquent tristement des disparitions jamais élucidées, prédisent avec effroi des apparitions fantastiques …

Prague se perd dans ses contradictions, Prague nous perd dans ses vents, dans ses brumes. Nos pas s’effacent dans la neige du pont Charles quand nous quittons la Vieille Ville pour Malà Strana. Le souffle glacial de la bise nous enlace par dessus une écharpe trop vite nouée, un Saint Philippe Benitius bienveillant et statufié nous presse de rejoindre l’autre rive. Le fleuve Vltava continue à séparer largement la ville comme le symbole d’une fracture définitive entre les riches bourgeois et les miséreux, entre les germanophones et les slaves.

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Ma mission : rendre compte de la situation tchèque à G. Clemenceau. L’Empire austro-hongrois peut-il compter sur cette partie de son territoire ? Les Praguois restent-ils de loyaux sujets de l’Empereur et feront-ils de bons soldats en cas de conflit ?

Quelques jours seulement pour sentir un peuple, des moments trop brefs pour rendre compte d’une situation complexe. Le ministre veut un rapport qui confirme ou dément les notes de notre ambassadeur à Vienne.

Les Allemands qui ne constituent plus que 7 à 8 % de la population vont-ils s’effacer définitivement et laisser le pouvoir aux Slaves ? Ou vont-ils continuer à tenir le haut du pavé, fiers de leur culture dispensée dans une Université séparée de celle des Tchèques ?

Elite élégante, avide de concerts, d’oeuvres d’art, propriétaires de mines, directeurs de banques , les Allemands ont « fait » Prague en partie à leur image.

La population tchèque, de plus en plus nombreuse, ne supporte plus de voir sa langue méprisée, ses traditions ignorées. La municipalité lui appartient désormais et les noms allemands de rues ou de places sont progressivement remplacés par leurs équivalents slaves.

Qui va l’emporter ? La force numérique d’un côté, la puissance financière de l’autre ; une culture germanique avec Schiller et Goethe ou les Frères Grimm à ma droite, un folklore slave qui renaît à ma gauche.

Notre ambassadeur à Vienne présente Prague comme la preuve vivante que l’Empire d’Autriche  demeure une « prison des peuples ». Il me reste trois jours pour me faire une opinion.

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Prague, 1900.

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