16 décembre 1907 : Mahler a quitté Vienne

Mission à Vienne ; suite …

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Gustav Mahler

J’espérais le rencontrer, le voir au moins une fois. Sa réputation de chef d’orchestre dur,  intransigeant mais génial, est parvenue jusque dans les milieux musicaux parisiens.

Il fait répéter ses orchestres jusqu’à l’épuisement, traquant chaque imperfection, chaque interprétation trop  » paresseuse  » de tel ou tel soliste. Le résultat final en vaut la peine et le public se presse pour entendre ses interprétations qui bousculent les traditions.

Il aime les orchestrations brillantes ; on le croit romantique mais il surprend tout le monde par son audace qui le fait aller beaucoup plus loin que ce que Beethoven avait pu imaginer en son temps.

Son assistant, Bruno Walter, avec lequel j’ai passé une fin d’après midi libérée, me le décrit comme  » petit, maigre, agité, avec un front immense, une crinière noire, des lunettes pétillantes, un visage que se partagent le chagrin et l’amour « .

Mais je ne pourrai voir Gustav Mahler.

En butte aux attaques répétées d’une certaine presse viennoise antisémite, il a dû quitter précipitamment ses fonctions de directeur de l’Opéra de Vienne.

Un simple mot d’explication de sa part, placardé sur la porte de l’Opéra, mot déchiré peu après par un passant. Affligeant, dérisoire. Ce grand homme doit s’abaisser à expliquer son départ alors que certains viennois devraient avoir honte d’écrire de tels articles dans leurs journaux nauséabonds.

L’Opéra de Vienne

Malher a rejoint les Etats Unis. Pays plus libre, plus ouvert. Bruno Walter me raconte qu’il tente de rejoindre une terre qui ne boudera pas ses propres oeuvres et qui le considérera comme un vrai créateur et non comme un simple chef d’orchestre.

1907 a été une année de douleur pour le maître. Il a perdu sa fille aînée emportée par la diphtérie. Il a aussi appris qu’il était atteint d’une maladie cardiaque incurable.

Il est temps qu’il quitte une ville qui ne l’aime plus. S’il n’a que quelques années devant lui, il faut qu’il fasse des choix et se consacre à l’essentiel.

Bruno Walter me certifie que ses symphonies qui reçoivent toujours un accueil mitigé, révèlent un talent hors du commun.  » On y trouve des mélodies que chacun peut fredonner, une polyphonie jamais égalée jusque-là, des rappels du folklore allemand, des débuts de marches militaires coupées par des adagio poignants. Tous les sentiments de la vie sont tour à tour exprimés grâce aux cordes, , aux trompettes, trombones, cymbales et timbales que Mahler aime tant.  » 

Comme tous les Français, je n’ai pas la chance d’avoir pu écouter une seule de ces symphonies. Je dois me contenter de lire les partitions que me tend Bruno Walter. Passionné de musique, ces notes écrites avec fougue par le maître me parlent tout de même; je rêve pourtant du moment où nos orchestres nationaux joueront -enfin ! -cette oeuvre très originale, qui charmera notamment les inconditionnels de Beethoven ou de Wagner.

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