Les familles nombreuses disparaissent peu à peu. En cherchant bien dans quelques régions à tradition très catholique comme la Bretagne, on en distingue encore quelques-unes mais cela devient une exception.
La famille française typique compte un enfant. Notre pays, il y a un siècle, pouvait s’appuyer sur un million de naissances par an pour peupler ses campagnes, remplir ses usines et pourvoir ses régiments. Aujourd’hui, le chiffre de 740 000 est péniblement atteint et ne permet guère de compenser les décès.
La France ne progresse plus guère en nombre d’habitants et reste, mise à part la région parisienne, lyonnaise ou lilloise, un grand pays vide.
Cela ne laisse pas d’inquiéter les autorités qui craignent une Allemagne qui s’accroît chaque année de 800 000 garçons et filles.
Réunion aujourd’hui autour du directeur de cabinet de Clemenceau, Etienne Winter pour examiner les mesures à prendre pour enrayer le phénomène et pousser les Français à faire plus d’enfants.
Les fonctionnaires convoqués font part de leur surprise :
– Vous n’imaginez tout de même pas que l’Etat va être garant de la taille de la progéniture dans chaque foyer ! Nous ne rentrons pas dans les chambres à coucher !
– L’essentiel de ce qu’on pouvait faire a déjà été fait (Ndlr : réponse très courante dans les réunions administratives) : par la loi Roussel, nous nous sommes assurés de la sécurité sanitaire des enfants placés en nourrices ; nous travaillons à rendre les maternités plus sûres ; des dispensaires aident les femmes qui ont des difficultés à allaiter leurs marmots… Bref, la France fait peu d’enfants mais elle soigne ceux qu’elle a déjà. Tout cela contribue à faire reculer la mortalité infantile et garantit donc une jeunesse plus nombreuse.
Winter et moi, nous reprenons :
– Il faut aller plus loin. Il convient de vraiment favoriser les familles nombreuses. Il faut trouver un moyen pour que les employeurs versent plus systématiquement des primes aux femmes qui accouchent, à celles qui allaitent et élèvent leurs enfants.
Un vieux chef de bureau du ministère des finances nous coupe magistralement :
– Je vous vois venir. Au départ, l’idée est généreuse : on veut aider les jeunes mamans pour qu’elles fassent plus d’enfants. Mais à l’arrivée, quel sera le résultat ? Les patrons vont constater qu’ils ne sont pas tous égaux face aux charges de familles de leurs employés. Ils vont donc commencer à imaginer des caisses de compensation des versements dont ils doivent s’acquitter : ceux qui ont beaucoup de jeunes femmes seraient accompagnés financièrement par les autres, en suivant un système financier dont je préfère ne pas imaginer la complexité.
Et ces caisses de compensation, et bien je vous le donne en mille, un jour, il faudra les aider avec des fonds publics ! Il faudra que mon ministère s’en mêle ! Vos idées d’aider les familles, c’est à terme, plus de fonctionnaires, plus de paperasse et plus d’impôts. Je suis contre !
Encore cette vieille lune : faire des enfants pour faire la guerre contre l’Allemagne ! Je suis scandalisé : Alors le don de la vie ne sert qu’à répandre la mort.
Je vous le dis : les peuples européens, français et allemands ne sont plus ceux du dix neuvième siècle. Ils ne se laisseront pas conduire à la boucherie par leurs gouvernements comme l’ont fait leurs aïeux. Les mères françaises et allemandes, dont vous voulez vous servir pour engendrer des soldats, s’opposeront à une nouvelle guerre entre les nations européennes et au vingtième siècle, enfin, la paix vaincra !
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C’est etonnant, le chiffre de 700 000 naissances par an est presque le me aujourd’hui.
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