« Ses défauts nous sautent au visage tout de suite et on met une vie pour découvrir ses qualités. » Clementine Hozier, épouse de Winston Churchill est notre hôte ce soir et se confie sur son époux. Ma femme et moi l’avons rencontrée dans un hôtel de Venise, un peu par hasard, lors de son voyage de noce avec Winston, il y a deux ans. Nous avons sympathisé quand son mari a su que j’étais, à ce moment, un proche collaborateur de Clemenceau. Depuis, Clementine nous rend visite à chaque fois qu’elle vient à Paris.
Winston Churchill et sa fidèle épouse Clementine, née Hozier
Parlant un français excellent – elle a enseigné notre langue outre-Manche pour arrondir ses fins de mois – elle mêle un esprit affûté, une grande culture, beaucoup de grâce, d’élégance et une certaine réserve. J’aime la faire parler sur Churchill, le Home Secretary anglais (ministre de l’Intérieur) aux méthodes à poigne rappelant celles du Tigre, voire de Briand lors de la grève des cheminots. Clementine et mon épouse préféreraient échanger des bonnes adresses de magasins des deux capitales ou critiquer les derniers spectacles à la mode. Je le sais et glisse donc mes questions indiscrètes entre deux commentaires sur une pièce de Feydeau à Paris ou de Galsworthy à Londres.
Je ne partage pas l’avis des diplomates du Quai qui sont persuadés que Churchill n’a guère d’avenir, coincé qu’il est entre les conservateurs qui considèrent ce fils de grande famille comme un traître à leur cause et les membres du Labour détestant sa fermeté face aux mouvements ouvriers. Ces fonctionnaires à courte vue ne voient pas son imagination, sa capacité à rendre complémentaire une ambition sociale et la grandeur de l’Empire, sa capacité de travail hors du commun et sa faconde propre à soulever les foules.
A Venise, nos discussions, souvent en anglais coupé de quelques mots français bizarrement prononcés, étaient étourdissantes. De Londres, il avait tout compris de Paris, de l’habileté et de l’esprit libre de Clemenceau dont il souhaitait s’inspirer en partie et surtout il portait en lui une vraie vision de son pays, au-delà de l’écume du quotidien et du tourbillon des petites querelles agitant la Chambre des Communes.
Clementine n’aime pas s’étendre sur son mari homme public, se méfiant sans doute et malheureusement de mes fonctions à la Présidence du Conseil. Elle ne me glisse donc que des détails sur l’homme privé : raide, maladroit face aux dames et très traditionnel dans sa vision des rapports entre sexes. Elle insiste aussi sur sa fidélité et sa loyauté : « J’ai le sentiment que notre mariage pourrait durer une éternité… » Et elle ne s’étend guère – charitable – sur son caractère impétueux et autoritaire même si je devine que notre Winston doit être un véritable tyran à ses heures.
Clementine Churchill, une femme pleine de qualités….
« Je suis ici parmi vous ce soir, loin du monde londonien et grâce à quelques amis comme vous, je cultive mon jardin secret à l’écart du Home secretary. Je me ressource ainsi et peut apporter ensuite à mon fougueux mari la sérénité dont il a besoin mais aussi, savez-vous, quelques conseils sur les gens qui l’entourent et qu’il juge parfois un peu vite. »
Après un dernier thé, Clementine nous quitte vers minuit et nous laisse une forte impression de solidité à toute épreuve.
Un homme avec une femme comme elle, ira loin.
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Il faut savoir que Clementine Hozier, « Clemmie » pour les intimes, a aussi une tête politique.
Il se dit en effet, dans les milieux bien informés, qu’elle polie beaucoup, « behind the scene », le ton souvent rugueux des discours de son mari et qu’elle arrive même à modifier (ô exploit !!) certaines de ses opinions, notamment sur les suffragettes anglaises dont elle soutient la cause, aux combats desquelles Winston Chruchill déniait pourtant ouvertement il y a encore peu, avec sa vigueur habituelle, toute légitimité, au point qu’à son mariage à Westminster en septembre 1908 on avait placé des douzaines de policemen autour de l’église St Margaret’s de crainte d’une action des suffragettes lors de ses noces. Elle prend même ces derniers temps, chose rare pour une femme de son milieu, la parole lors de meetings politiques.
Beau duo en tout cas. Winston et Clemmie devraient aller loin dans la vie….
Bye
Olivier Stable
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j ai pas tout lu mais c’est quand meme interessant…j’y reviendrai…pauvre d’elle…Quant a Churchill…oui je lui préfere sa femme; c’est évident, a ce propos je ne l’avais jamais vue avant mais sa plastique est jolie. C’est le moins qu’on puisse dire !
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Voilà du wikileaks intelligent et élégant !
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