Le Parisien, le Toulousain ou le Lyonnais boivent cent soixante litres de vin par an. Quelle santé !
Une loi du 29 décembre 1897 abaisse les droits d’octroi pour les boissons dites « hygiéniques ». Autrement dit, les communes ne peuvent plus percevoir de droits d’entrée trop élevés pour un breuvage, considéré comme sain, comme le vin. Les viticulteurs, puissamment organisés en groupe de pression auprès des parlementaires, veillent à ce que ce texte ne soit pas abrogé.
« L’Ame du Vin » de Carlos Schwabe
Le délicieux liquide rouge continue donc à se répandre à flots dans les rues de la capitale et étanche les soifs de tous les instants. Onze mille troquets et cafés servent la moitié de la consommation des citadins, le reste est vendu aux bourgeois ou facturé très cher dans les restaurants.
Pour payer moins cher son pot ou son litre de Beaujolais, il faut franchir les portes de Paris et aller au-delà des limites de l’octroi. La fiscalité fait donc les beaux jours des cafés d’Argenteuil où les buveurs appellent leur débitant d’alcool « le marchand de consolation ».
Le vin reste un phénomène national, intouchable. La mauvaise qualité de l’eau à certains endroits, le manque de variété de l’alimentation à d’autres expliquent en partie son succès dans les couches populaires. Ces dernières vivent dans un environnement où la rencontre avec l’alcool est inévitable. On boit des litres de rouge pour se rafraîchir sur les chantiers (les bouteilles sont distribuées par les contremaîtres) ; on boit à la sortie de la mine et de l’usine ; on boit dans les cabarets ou les cafés qui sont les seuls lieux agréables d’un petit peuple qui s’entasse souvent dans de bien tristes logements.
On boit quand il fait chaud, quand il fait froid, pour rire, pour oublier, pour se mettre en verve. Le vin est un aliment, une compagnie et toujours un plaisir.
Ceux qui n’ont pas appris à boire après l’école étant jeunes ou ceux dont les parents ne servaient pas du vin à table pour tous, peuvent se rattraper au service militaire. Si le passage sous les drapeaux n’a pas suffit, le monde du travail corrige cela.
A cause des maladies successives de la vigne en Ile de France – oïdium, mildiou puis phylloxéra – il n’y a bientôt plus de vignerons produisant aux portes de la capitale. Le réseau de chemin de fer français, centré sur Paris, constitue la parade et déverse des wagons remplis de milliers de tonneaux à la gare de Lyon.
Quelques médecins s’inquiètent des conséquences sur la santé de cet océan de rouge qui envahit la capitale. La police regrette d’avoir à intervenir dans les fréquentes bagarres à la sortie des troquets. Des patrons – peu nombreux – font un lien entre les accidents du travail et la consommation de vin. Mais ces quelques voix demeurent inaudibles.
Les Français aiment le vin et cette boisson cimente tout un peuple par delà les frontières des religions et des opinions politiques. On lève le coude chez les socialistes comme à l’Action française, chez les peintres sans le sou comme dans les demeures des riches bourgeois.
Des trois couleurs du drapeau français, celle que nous aimons le plus, c’est le rouge !
Je pense que cet article est toujours d’actualité …
Bonne journée.
Bises à vous.
Sophie
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On parlait aussi alors du vin comme le ‘lait des vieillards’ à cette époque !
Pas de prévention routière aussi à l’aulne de l’automobile : des publicités vantaient les mérites d’un petit Cointreau avant de reprendre le volant !!!
De quoi faire frémir nos politiques actuels !
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Si Pasteur avait su, il n’aurait jamais proféré une ânerie pareille ! Le vin, « plus saine et plus hygnénique des boissons » ! Il n’a pas dû visiter les services de médecine hommes dans les hôpitaux, remplis d’alccoliques dans un état de délabrement physique et mental avancé, ni s’intéresser beaucoup aux questions sociales (on en parle déjà, de son temps, des ravages de l’alcool, en particulier chez les pauvres, et le vin n’y est pas étranger !). Il aurait mieux fait, le bon Pasteur, de militer pour l’amélioration de la qualité de l’eau, la plus saine et la pus hygiénique des boissons, lorsqu’elle n’est pas polluée…
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60 litres par an, ce n’est pas énorme.
Ceal fait à peine un quart de rouge par jour
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60 litres/ 365 jours=16,41 centilitres soit un verre par jour…en comptant les fêtes. Mais la mythologie a la vie dure.
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Très bonne remarque de Lefrançois et d’Erwan.
Suite à cette 1ère version de mon article (qui indiquait 60 litres de consommation par an et par Français) et à ces commentaires, je suis retourné à mes sources (rafraîchissantes comme un verre de Beaujolais) : Paris, par ex, absorbait un peu plus de 4 millions d’hectolitres de vin par an en 1900. La population parisienne dépassait, à cette date, les 2,5 millions d’habitants. Ce qui donne une consommation de 160 litres et non 60 litres comme la source que j’avais citée, sans suffisamment vérifier, l’indiquait. J’ai reproduit, sans doute, une coquille.
J’ai continué mes recherches et je peux vous indiquer que notre consommation actuelle, nous autres Français est, en 2008, de… 60 litres par an. Elle était encore de 100 litres par an au début des années 1960.
Je salue encore ceux qui apprécient et consomment le vin…avec modération et ceux qui apprécient ce blog, sans modération.
A votre santé à tous et merci pour votre vigilance !
L’auteur
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oui à une consommationde qualité en qhantité modérée.Je bois un verre de vin vieux au repas de midi soit moins de 60L an.Rien ne doit être interdit ou exclu sauf les excès.
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Ça n’est qu’une moyenne160 litres par années de 365 jours représentent 0,43 litre par jour (c’est à dire une pinte approximativement). Tenant compte du fait qu’à l’époque beaucoup de vins avait un taux d’alcool plus faible qu’aujourd’hui (de l’ordre de 8 à 10º), ça ne parait pas si dément que cela.
Ajoutons le fait que les gens marchaient plus et dans l’ensemble faisaient plus d’exercice.
Cela dit, si les ouvriers sur les chantiers se rafraichissaient exclusivement à coups de jaja, ils devaient pour leur part en ingurgiter bien plus d’une pinte.
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Ce type de calcul de la consommation par habitant ne signifie rien du tout.
Vous n’allez tout de même par inclure les enfants en bas âge dans ce calcul ? En estimant large suivant les critères de l’époque, je compterai le nombre de consommateur en excluant tous ceux en dessous de disons 12 ans, ce qui réduit considérablement le nombre de picoleurs et fait passer le seuil de la moyenne bien au delà des chiffres annoncés.
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La « consommation par habitant » semble être le critère retenu par les spécialistes de la consommation de vin. C’est l’unité de mesure officielle, du moins dans les articles portant sur cette question. Pour autant, votre remarque est bonne et les chiffres annoncés doivent être relativisés.
Petite remarque à mon tour : je ne suis malheureusement pas sûr que certains enfants de 12 ans – et moins- de la Belle Epoque n’étaient pas déjà en contact avec l’alcool de façon régulière.
L’auteur
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Pour répondre à Zorg, Pasteur connaissait les ravages de l’alcool, en particulier chez les pauvres, et il a très précisément dit : « Le vin est la plus saine et la plus hygiénique des boissons. Malheureusement les propriétés hygiéniques du vin, on ne saurait le dissimuler, sont altérées par une augentation de son élément alcoolique. Plus un vin est riche en alcool, plus il s’éloigne des qualités requises ». In : Etude sur le vin. Imprimerie Impériale 1866. Il a d’ailleurs été le co-fondateur de la Ligue anti-Alcoolique 1872 qui existe toujours actuelle sous la dénomination d’Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (www.anpaa.asso.fr)
Hygiénique s’oppose à la mauvaise qualité de l’eau à certains endroits qui était d’autant plus souvent polluée qu’il n’y avait pas à l’époque les stations de traitement et d’épuration actuelles.
Je confirme par ailleurs les chiffres donnés par l’auteur.
Salut à tous
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le vin était à l’époque la plus hygiénique des boissons car il était de par sa fabrication dépourvu de germes pathogènes, tandis que l’eau de puit ou de rivière était souvent malsaine et transporteuse de maladies.
Quand au lait, non pasteurisé, puisque c’est Pasteur qui l’a inventé, à moins de le faire bouillir (sans le laisser déborder ! et je vous garantis que ce n’est pas évident) et de le boire juste après, il n’y avait rien de plus dangereŭ !
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La ration quotidienne de vin pour un poilu etait d un demi litre en 1916 et a partir de 1918, trois quart de litre, soit une bouteille par jour. Il titre 9 degres d alcool.
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« 160 quelle santé! » – Madame raille. Les rois du rail, les vrais, les durailles, descendaient 10 litres de rouge par jour ouvré. Le vin ça descend, ça nourrit, ça instruit. Tout en 1. Jour=rouge, t’as pas ouï? Le même mot, son inversé. Pour l’ouvrier journalier tous les jours sont rouges. Mettons seulement 200 jours ouvrés l’an (je raille), à 10/jour ça fait quand même 2000 litrons. Alors 160 je crains… que Mme raille…
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Foin de calcul, messieurs, buvons en ces temps de division, de discours acides et réunissons-nous, vive l’unité, sans craindre l’ivresse, que cette Gradiva rousse un peu alcoolique
(v. illustration » ____l’âme du vin » ___), le pied retourné, la tête à l’envers, qui boit du rouge et nous y invite, fédère à nouveau ceux qui se contorsionnent en tous sens dans l’opposition et plus royal – istes que le roi, en oublient même qu’ils ont été rouges avant d’être roses, palichons, lang – uides et mélanch – oliques.
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Voir aussi dans un autre blog du Monde.fr :
http://closdesvolontaires.blog.lemonde.fr/2009/12/03/le-vin-boisson-hygienique/
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En réponse à Olivier le tigre : Je vous remercie pour le travail de recherche que vous avez efectué concernant la fin de la phrase de Pasteur …Malheureusement les propriétés hygiéniques du vin, on ne saurait le dissimuler, sont altéreées par une augmentation de son élément alcoolique… pendant 20 ans j’ai « trimbalé » comme un boulet, -sans même- en avoir vraiment conscience un amour furieux et immodéré pour Bacus. Bref, l’alcool me détruisait … Depuis près de trois ans, je suis toujours alcoolique (l’alcoolisme est une maladie à vie) mais je ne bois plus une seul goutte de ce breuvage ; et milite désoramais contre ce produit…
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