Londres, la salle de l’Albert Hall est pleine à craquer. L’atmosphère est électrique. 10 000 femmes attendent en trépignant, des dizaines de journalistes fébriles ont le stylo à la main : le chancelier de L’Echiquier Lloyd George va parler du droit de vote des femmes. Va-t-il l’annoncer pour demain ou faudra-t-il modifier en profondeur les lois britanniques ?
Pour les suffragettes présentes emmenées par la mince et nerveuse Charlotte Despard, 64 ans, la question importe peu. Il faut agir de façon spectaculaire, frapper l’opinion publique, profiter de cette foule acquise à la cause et de ces journalistes venus de tous les pays.
L’énergique Charlotte Despard, irlandaise d’origine, mariée à un Français décédé en 1890, est l’une des meneuses des suffragettes britanniques. Elle consacre aussi son temps à lutter en faveur des travailleurs pauvres.
Lloyd George monte à la tribune. Il déplie les feuilles de papier d’un discours qu’on imagine long.
Il prononce à peine quelques mots.
Charlotte Despard dressée dans sa loge donne alors le signal du tumulte en levant vigoureusement les bras au ciel. Le Chancelier tente de continuer son allocution mais les cris, les insultes et les sifflements stridents l’en empêchent.
Les huissiers se ruent vers la loge de Mme Despard pour tenter de l’expulser. Au moment où ils parviennent à l’encercler, celle-ci, le teint pâle comme la mort et les yeux brillants de colère sort un long fouet et le fait claquer tout autour d’elle. Effrayés, les hommes, pourtant nombreux et solidement bâtis, battent en retraite prudemment et se protègent les yeux avec leurs bras à chaque passage de la longue lanière.
Le chahut augmente, les coups de parapluie pleuvent sur les policiers trop peu nombreux qui essaient d’éloigner la foule de la tribune. Le joueur d’orgue tente de jouer, en catastrophe, un morceau à sa façon, pour couvrir le vacarme. Mais le personnel de l’Albert Hall est rapidement débordé.
Le directeur de la salle, conscient de son impuissance, commande à ses hommes de s’éloigner de Charlotte Despard.
La meneuse range alors son fouet et d’un geste souverain fait signe à ses militantes de reprendre leur place et faire silence.
En quelques instants, comme par enchantement, le calme revient.
Lloyd George regarde, anxieux, en direction de Charlotte Despard. Du haut de sa loge, elle le fixe de façon fière et dominatrice.
Ironiquement, elle s’écrie : » Sir, vous aviez quelque chose à nous dire ? Des bonnes nouvelles à nous annoncer ? Votre gouvernement continue à nous confisquer nos voix mais nous allons vous laisser vous exprimer. Soyez bref, les décisions que vous avez à prendre ne sont pas longues à décrire : le droit de vote pour toutes les femmes, à toutes les élections, dès demain ! Sir, vous avez la parole. »
Le séduisant David Lloyd George est, en 1908, un jeune chancelier de l’Echiquier (NDLR : ministre des Finances britannique) promis, manifestement, à un bel avenir.
David Lloyd George, d’une voix mal assurée, reprend alors le fil de son intervention. Il explique, maladroitement, qu’il est bien évidemment favorable au vote de la gent féminine, que celle-ci doit avoir les mêmes droits politiques que les hommes, que la majorité du gouvernement pense comme lui.
Les 10 000 femmes l’écoutent dans un silence glaçant, leur meneuse continue à le dévisager avec un air de défi permanent.
Le chancelier complète alors :
» Je ferai donc ajouter dans la loi électorale, une clause prévoyant le vote des femmes. Mais, voyez-vous, l’ajout de cette disposition, ne peut naturellement se faire qu’après des élections générales favorables à un tel projet… »
Les cris reprennent : « Hou, hou, menteur, lâche, nous avons assez attendu comme cela, dehors ! »
Charlotte Despard a sorti à nouveau son fouet et provoque, à chaque claquement, une augmentation des hurlements. La scène commence à tourner à l’émeute. Le chef des policiers supplie le chancelier de ranger son discours et de le suivre vers une porte dérobée. Celui-ci ne se fait pas prier. Il quitte précipitamment et piteusement la tribune.
Les 10 000 femmes sont alors maîtresses de la salle. Elles ont chassé l’hypocrisie, les faux semblants, les discours dilatoires.
Demain, la presse du monde entier parlera à nouveau des suffragettes britanniques intrépides. Et peut-être un jour, les hommes laisseront à leurs compagnes la place politique qui leur revient de droit.
Peut-être un jour…
Charlotte Despard qui n’est plus toute jeune, mobilise les foules avec une énergie inépuisable
Quel article insolent! Sous couvert d’exactitude historique, il campe deux sexes de la même façon que beaucoup de féministes le font. L’homme : veule, lâche, arrogant, poltron et égoïste. La femme : nimbée de vertu outragée et obligée d’agiter un fouet et de hurler.
Imaginons un instant des pères spoliés et les nombreux hommes injustement accusés de violence conjugale devant un chancelière de l’Échiquier, munis de fouets et hurlant. Ils passeraient pour des désaxés violents (alors que pour les femmes de cet article, leur violence est un signe d’indomptabilité et de force).
Car c’est cela l’égalité aujourd’hui : à la femme le droit de jouer à la harpie, à l’homme celui de se faire humilier. Cette imposture durera tant que les femmes n’auront pas acquis le droit d’assumer, outre les privilèges masculins, la responsabilité morale de mal faire, qui incombe presque toujours à l’homme.
Les femmes ont-elles eu le droit de servir de chair à canon en 1914-1918? Non, mais cela, on le passe sous silence car on ne regarde que les privilèges de l’homme et les désavantages de la femme. Et non l’inverse.
Et puis finir ce méchant texte par « Peut-être un jour… », qui met encore une fois tout l’opprobre sur le dos de l’homme et innocente la femme, cela revient à douter des efforts de nombreux hommes et à légitimer toute autre violence féminine au nom de cette incapacité masculine.
Ne voyez-vous pas que vous préparez un retour de bâton de la part d’hommes, de plus en plus nombreux et excédés de cette rhétorique persifleuse?
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Extraordinaire!
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Cher excédé
Il convient de préciser plusieurs points :
– ce journal est à lire avec les yeux d’une personne de 1908 qui, légitimement peut s’étonner des faibles droits politiques dont bénéficient les femmes ;
– la lâcheté dont fait preuve ce jour-là le ministre britannique ( enfin pas tout à fait, il ose venir devant une assistance très hostile !) n’est pas un jugement sur la gent masculine en général ;
– pour ce qui est de la participation aux guerres, s’il est exact que les femmes seront plutôt épargnées par la mortalité en 14-18, la guerre suivante ne fera en revanche guère de distinction entre hommes, femmes…et enfants ;
– votre commentaire pourrait être historiquement très intéressant pour un historien de notre époque en ce qu’il dénote une évolution profonde de la mentalité masculine (très différente de celle de la Belle Epoque) et des conditions de celle-ci (situation des pères après le divorce par ex) : autrement dit, si la situation des femmes reste encore à améliorer, celle des hommes est aussi à prendre en considération (la question en 1908 ne se posait pas en ces termes );
– ce journal s’appuie sur des faits rigoureusement exacts mais se permet un peu d’humour et de dérision. Il laisse la place, ici et là, à l’imagination pour (essayer de ) détendre un peu le lecteur…
L’auteur
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Charlotte est une dompteuse fabuleuse, et Olivier n’est pas un tigre de papier !
et Excédé va finir par un ulcère d’estomac s’il ne prend pas un peu de recul…
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j’ai bien situé l’article dans son contexte 1908
et suis absolument d’accord avec son auteur
il me semble que la rivalité actuelle entre hommes et femmes ne les rend pas sereins et constructifs, ils devront dépasser cette étape pour trouver un équilibre, une vie commune respectant la personnalité et la liberté de chacun.
il était plus « simple » pour mes parents et grands parents de trouver un rôle différent qui n’impliquait pas forcément de rivalité, je parle de généralités évidemment, il a toujours existé des hommes et des femmes très évolués dans leurs comportements
je n’ai pas eu à revendiquer mon indépendance (j’ai 69 ans) car elle m’a toujours semblé évidente
ma mère avait été heureuse et honorée de pouvoir voter après la guerre,
je n’ai jamais envisagé qu’il puisse en être autrement
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@ excédé
les femmes servent de chair à canon depuis des centaines d’années, violées, torturées, asservies au rôle d’accessoire ménager, brisées dans leur chair vous en voulez encore et exigez qu’on fourre des bouches à feu de leur chair ?
c’est d’un utérus que vous êtes né, ne l’oubliez jamais, du corps déchiré d’une femme qui a souffert 12 heures pour la mise bas en échange de 7 secondes de jouissance
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Bonjour à tous
Maintenant que « excédé » a eu sa réponse… cinglante (par souci d’équilibre et de liberté d’expression, j’ai laissé passer cette nouvelle note), j’informe l’aimable communauté internaute et blogueuse que ce journal « il y a un siècle » souhaite conserver une ligne « légère », que je ne me prends pas totalement au sérieux et que je m’efforce dans mes écrits de ne vexer personne….et de faire sourire tout le monde (des fois, c’est raté !).
Je ne publierai plus d’autres commentaires rageurs, vengeurs et sans humour sur cette question du droit de vote.
Encore merci à ceux qui continuent à me lire et à me soutenir dans ce gros travail que représente « il y a un siècle »
bravo à ceux qui savent témoigner de façon amusante ou à ceux qui apportent un vrai « plus » pour approcher de plus près la vérité historique.
L’auteur
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@witness: et on ne m’a pas demandé mon avis avant, pour savoir si je voulais vivre…
Bien, les conneries étant toutes dites, merci à l’auteur pour cette vivante description de la situation du début du siècle. Gardons-là en mémoire et tâchons aujourd’hui d’en prendre de la graine pour que chacun(e) puisse avoir le sentiment de tenir sa vie dans ses propres mains.
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