26 septembre 1910 : Un fiacre réduit en miettes

Les cochers de fiacre sont parfois bien imprudents. Je viens d’être appelé par le préfet de police pour assister aux opérations de secours relatives à un terrible accident rue de Rennes.

Vers sept heures du soir, la voiture 6032 conduite par le cocher Carrène de la Société coopérative de la Seine s’est engagée dans la traversée de la voie de tramway alors que le « Saint-Germain des Près Châtillon » se dirigeait vers lui à toute vitesse. Un bon coup de fouet sur le cheval devait permettre d’accélérer et de traverser à temps. Ce n’est qu’au moment où le fiacre a commencé à franchir les rails que Carrène s’est aperçu, avec horreur, qu’un second tramway de la ligne Clamart Saint-Germain arrivait dans l’autre sens. Trop tard pour reculer !

tramways.1285484259.jpg

Les tramways dans le Paris de 1910

Dans un choc terrible, le véhicule en bois a été brusquement serré puis abominablement broyé entre les deux lourds et puissants tramways, incapables de freiner à une telle allure.

Les nombreux passants ont unanimement poussé un cri d’effroi en voyant le fiacre réduit en miettes avec des morceaux projetés violemment un peu partout sur la chaussée.

Un quart d’heure après le drame, j’ai donc reçu un appel du préfet de police Lépine m’envoyant un chauffeur pour me conduire sur les lieux de l’accident.

Quand je rejoints le haut fonctionnaire, sa voix est blanche : « Monsieur le conseiller, la Présidence du Conseil doit être prévenue d’une telle catastrophe et je tiens à ce que vous assistiez vous-même aux travaux de secours ! »

Sur place, les pompiers de la caserne du Vieux Colombier sont tous mobilisé pour dégager les cinq victimes. Il faut l’aide des passants tellement les masses à soulever sont énormes. Après de trop longues minutes d’efforts et de vaines tentatives, trois corps atrocement mutilés et sans vie sont extraits et transportés au poste de police de Notre-Dame des Champs. Le préfet et moi avons la gorge sèche. Nous tentons de nous consoler en constatant qu’aucun enfant n’a péri.

On arrive enfin à sauver deux mômes, conduits de toute urgence à l’hôpital de la Pitié.

Quant au cheval du fiacre 6032 et par un hasard peu ordinaire, il n’a subi aucune blessure. Le préfet et moi, nous le regardons, les yeux ronds, manger de l’herbe, tranquillement, sur le bas côté, attendant de reprendre du service.

fiacre.1285484384.jpg

Un fiacre dans Paris vers 1900

Pour savoir comment on appelait les conducteurs de tramway en 1910, rejoignez le groupe des amis d’Il y a un siècle !

Un commentaire sur “26 septembre 1910 : Un fiacre réduit en miettes

Ajouter un commentaire

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

Propulsé par WordPress.com.

Retour en haut ↑

%d blogueurs aiment cette page :