Le » franc or «
» Les prix flambent ! » Voilà une expression qui amène peu de contestations lorsqu’elle est lancée dans un déjeuner entre collègues. On peut aussi l’essayer avec ses voisins et obtenir sur le sujet un consensus rapide dans tout l’immeuble.
Et pourtant ! La Statistique Générale de France, bureau prestigieux rattaché, il y a peu, au tout nouveau ministère du travail de Viviani, apporte une vision plus nuancée du sujet.
Une première grande enquête, transmise à notre ministre, a été réalisée l’an dernier sur la consommation des Français.
– S’il est vrai que l’ouvrier, l’employé et le petit fonctionnaire continuent de consacrer bien plus de la moitié de leurs revenus à l’alimentation, ils se procurent pourtant de plus en plus de viande et ils mangent en revanche moins de pain, aliment de base du pauvre.
– Les bourgeois mobilisent moins d’un cinquième de leurs ressources pour la nourriture et investissent de plus en plus dans la rente mobilière.
– Les employés comme les bourgeois essaient de se constituer des réserves alternant dépôts en banque, achats de valeurs (emprunts d’Etat) et bas de laine (au sens propre du terme). Le franc germinal ou franc or, finalement très stable (0,32 g d’or), est conservé dans de nombreuses chaumières, maisons ouvrières ou appartements bourgeois. Chacun met de côté pour ses vieux jours. Rares sont en effet les professions où l’on peut bénéficier d’une pension.
En fait, quand on évoque la » vie chère » , de quoi parle-t-on ?
Chaque Français veut maintenant acheter du cacao pour ses enfants ou boire du café. On met à présent du sucre partout et les petits adorent cela. Or, ces denrées restent plus coûteuses que le pain ou la traditionnelle pomme de terre.
Les vêtements confortables en laine ou coton font reculer les blouses. Sur ces articles, là aussi, le porte monnaie est plus rudement mis à contribution qu’autrefois.
Et encore, je ne parle pas du logement. Si on souhaite » l’eau et le gaz à tous les étages » , la petite plaque bleue si recherchée, il faut accepter d’amputer une part non négligeable de ses revenus.
En définitive, que les Français veuillent simplement se nourrir de façon variée ou qu’ils aient envie de profiter un peu des nouveaux produits ou conforts modernes, ils n’ont pas fini d’avoir le sentiment de ne pas gagner assez !
Il ne faut pas tirer de conclusions trop hâtives de ce rapport de la Statistique Générale de France
Nul doute effectivement que le petit peuple consomme de moins en moins de pain : mais c’est la conséquence des manigances sans scrupules des boulangers , qui pétrissent à dessein des miches de moindre saveur pour pousser leur clientèle vers les brioches plus rentables.
Il est de même notoire que les épiciers s’acoquinent en cartels, quartier par quartier, pour accorder leurs prix au plus haut, dans une parodie de libre commerce où le simple citoyen, ne pouvant se tourner vers le moins-disant, a perdu son pouvoir de négociation.
Le gouvernement devrait prendre des mesures et légiférer rapidement pour punir sévèrement de telles pratiques.
Sinon les ouvriers, excités par les anarchistes, finiront par exiger des hausses de salaire, ce qui renchérira le prix des biens dans une spirale dont, une fois de plus, les allemands et les britanniques profiteront pour damer le pion de nos entreprises d’exportation.
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Monsieur Félix potin et ses stupides vignettes à collectionner a fait beaucoup pour populariser le cacao en poudre auprès de nos enfants et de nos épouses. La hausse de ce produit, de 18 centimes entre l’hiver 1907 et l’hiver 1906, c’était il y a deux ans, lui est imputable. Je n’en démordrai pas !
Quant au sieur Pasteur qui, avec ses microbes « pasteurisés », a révolutionné nos Laiteries Parisiennes, je ne le salue point, tant son hygiènisme est porteur de valse des étiquettes.
Enfin, nos Belles de Fontenay sont ce matin à 35 centimes la livre, soit 0,70F le kilo. Le Pays ne s’en remettra pas….
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