14 juillet 1914 : Poincaré ira bien en Russie

Défilé des maîtres chiens le 14 juillet 1914
Défilé des maîtres chiens le 14 juillet 1914
Les pelotons cyclistes au défilé du 14 juillet 1914
Les pelotons cyclistes au défilé du 14 juillet 1914

J’ai tout fait pour le dissuader. Mon patron Poincaré partira bien pour un voyage diplomatique en Russie juste après les fêtes du 14 juillet. Il sera accompagné du Président du Conseil Viviani et sera reçu par le tsar Nicolas II, son président du Conseil Goremykine et le ministre des affaires étrangères Sazonov.
Le président a balayé d’un revers de main mes craintes d’une dégradation de la situation internationale.
 » Et si l’Autriche s’attaque à la Serbie pendant votre absence ?  »
La réponse du chef de l’Etat est sans appel :
 » – C’est peu probable. La Serbie finira par céder aux exigences éventuelles de Vienne. Elle ne veut pas de nouvelle guerre car elle est sortie exsangue des précédentes.
– Et si la Serbie subit tout de même une attaque ? Allons-nous nous porter au secours de notre alliée ?  »
Poincaré – surpris par mon insistance – dirige comme des fusils ses yeux gris acier vers moi. Sa voix est devenue sourde, comme s’il craignait qu’on écoute ses propos :
 » – eh bien, nous ferons profil bas. Nous n’allons pas déclencher une guerre européenne pour la Serbie…  »
– Et si ce sont les Russes qui aident les Serbes ?
Poincaré, excédé :
 » Olivier, c’est justement un peu pour cela que je vais en Russie. Pour les inviter à des attitudes modérées et à préserver la paix !  »
Je n’obtiendrai pas plus du Président aujourd’hui. Le défilé du 14 juillet à Longchamps va commencer bientôt. L’automobile attend dans la cour de l’Elysée. Je reste sur le perron avec mes doutes et mes craintes.
Pour me rassurer, je me plonge dans la presse du jour. L’attentat de Sarajevo semble déjà de l’histoire ancienne et a disparu de la une. On y préfère un article sur les progrès sanitaires dans les colonies, un autre sur la course d’aéroplanes Londres-Paris-Londres ou encore signaler que la France manque de sous-officiers et d’instituteurs.
Pendant que le gros majordome, tout essoufflé, part chercher en courant le haut de forme oublié par le président, le chauffeur de ce dernier descend du véhicule et passe un dernier coup de chiffon sur le capot pourtant déjà rutilant.
À l’entrée du palais, les livreurs déchargent, en oubliant d’être silencieux, de lourdes caisses de victuailles en vue du dîner de gala de ce soir. Au même moment, les maîtres d’hôtel s’affairent autour de la table dressée pour le repas de midi.
Je jette alors un regard amusé sur le programme du défilé. Je n’ai pas manqué d’imagination : cette fois-ci, nous avons fait venir les brigades de maîtres-chiens et les pelotons cyclistes. Consigné à l’Elysée pour assurer la permanence, je regrette de ne pas voir la parade de ces militaires peu ordinaires en vrai !
Et de nouveau, mon sourire revient et j’oublie enfin Sarajevo…

Poincaré aux cérémonies du 14 juillet 1914
Poincaré aux cérémonies du 14 juillet 1914

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